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La fin du triptyque de l’année épisode 3/3

La fin du triptyque de l’année épisode 3/3

Pour démarrer ce dernier épisode, je divulgache, je spoile un peu la fin. C’est un déroulement de course que je n’ai jamais vécu avec des sensations hyper positives. Pour mieux le comprendre j’ai tenu à prendre des points de comparaison. Comparaison avec d’autres coureuses et coureurs qui je l’espère n’en prendront pas ombrage. Même si je l’écris par la suite, je tiens à repréciser tout le respect et l’admiration que j’ai pour ces coureuses et coureurs que je tiens pour bien plus forts que moi et qui ont effectué une superbe course.

Après Les 88km du Périgord en avril, les 80km du GRP fin aout, je devais finir avec les 80km des Templiers à la Toussaint. Finalement je re-triple l’affaire. 80km des Templiers le dimanche, 25km des Patarins le vendredi puis 65km des Hérétiques le samedi. L’insouciance et l’inconscience des inscriptions a fait place à une sourde appréhension avant-hier et hier (durant la course des 25km). Peut-on parler d’une angoisse ? Clairement. Quand je repense à mon esprit hyper concentré sur la ligne la veille… Il n’y a vait pas moyen de rire et de sourire. Et pourtant il ne fallait pas inquiéter Angéline. Bon … ouf c’est passé !

Finalement, c’est rassuré sur les barrières horaires et les dénivelés que je prends le départ à 5h du matin du Trail des Hérétiques. Il n’y a « que » 65km à parcourir. Même si les 26,5km et 900 D+ d’hier comparés aux 25km et 600D+ annoncés sont dans la tête. Autant un km de plus ce n’est pas un drame mais s’il faut rajouter 50% de dénivelé… Je retrouve mon insouciance. Après tout je vais le faire. « Ce n’est rien. »

Sur la ligne de départ je retrouve des bleus et noirs du Rapv. Christophe Robin bien sûr, qui loge avec nous, mais aussi Damien, Cindy, Françoise, Fred. Tout le monde est chaud et cette fois-ci je pars de la fin du peloton.

Je démarre tout de même sur ce que j’estime être un bon rythme, 10km/h. Mais je tiens le rythme en faux plat également. En vérité je suis plus autour de 6’44’’/km. Je vous laisse faire la conversion. Je double rapidement les rose et noirs et les bleus et noirs pour me retrouver avec Yvan et Fabrice. Passés le lac de Cavayère, Cindy et Fred nous dépassent en trombe dans une côte. Les bâtons sont de sortis et Cindy active sec. Je ne peux que constater, à nouveau, toute l’efficacité de Cindy. Habituée des longs et des offs, elle est vraiment très efficace. Accompagnée de Fred, elle a trouvé un binôme de choc. Si ils ont décidé de faire course commune c’est pour aller vite et loin (je suppose). Content de les avoir aperçu, je me dis que maintenant je les reverrai à l’arrivée. Quelques hectomètres plus loin, Yvan nous a lâché sur une petite accélération. Je trouve les jambes un peu lourdes à la suite du 25 de la veille alors je ne tente même pas de suivre. Ce serait de toute façon très prétentieux de ma part de le suivre en temps normal. Yvan est bien entrainé, parcours régulièrement les trails en Vendée alors que je n’ai plus l’habitude de le faire. Mon constat est le même : »Bon ben c’était sympa. Rendez-vous à l’arrivée. » Reste Fabrice. Je sens que c’est dur passé le 12ème. Je propose à Fabrice de passer plusieurs fois mais il me répond que le rythme lui va bien et que si je l’emmène comme ça jusqu’au 19ème c’est parfait. Finalement lors d’une relance je ne suis plus et il s’envole. Encore une fois le constat est sans appel et c’est aussi normal. Fabrice a beau être novice sur la distance, mon ancien coach de foot demeure un immense moteur. Le foncier n’a jamais été son problème lorsqu’il jouait au foot, ce n’est pas aujourd’hui que ça va changer. Je vais enfin me mettre dans ma course. Comme aux Templiers je me rends compte que lorsque je cours avec d’autres personnes je ne parviens pas à me mettre dans la course. Ce n’est pas mon rythme. Et puis à force j’ai l’habitude de courir seul, de me mettre dans mon effort seul. Je ne m’attends pas à une partie de plaisir sur cette fin d’enchainement 80-25-65. Il ne faut pas rêver. Je ne m’appelle pas Michaël Bouyer au GRP. Le seul gars capable d’enchainer 3 courses en 3 jours et de malgré tout, mettre à l’amende tout le monde sur le 80km le dernier jour. Je sais que e rentre dnas une partie difficile physiquement. Il faut que mon corps et mon esprit s’habitue un peu et ça va le faire… Normalement. Je m’attends à voir arriver Françoise. Elle m’a toujours dépassé sur les trails de plus de 40km. Ce serait sympa de faire un bout de chemin avec elle. En fin de compte c’est Éric Lorin, président du Jogging Club, qui me reprend dans la 1ère descente. Il était avec Maryse mais comme il dit : « je me laisse descendre ». Mais attention…. je le reprends dans la bosse. 😉 Pour une fois que j’ai un rythme supérieur à quelqu’un ! Mais une pause technique m’interrompt. Je bascule un peu plus loin. Je descends gentiment vers le 19ème. Le ravito de Molière est superbe. Un petit village en pierre, des ponts. C’est sublime. Je me fais saluer par Jérôme Aubret. Comme aux Templiers j’éprouve le besoin de manger un peu. Je repars avec ma soupe dans mon gobelet. Car malgré mon envie j’essaie de ne pas trainer. Je laisse ainsi Éric seul, après avoir encouragé Françoise qui arrivait sur le ravito. Je suis au 19ème en 2h36’ après 738D+. Fabrice, Yvan, Cindy et Fred m’ont déjà collé 6’. Ça ne va pas s’arranger.

Je repars seul du ravito. Seul devant et seul derrière. Enfin. C’est trop cool. Deviendrais-je associal ? Disons surtout que la nature est belle. Et quand je suis seul la nuit j’ai vraiment l’impression de me faire envelopper par l’ombre. Les sens sont plus en alerte et j’aime cette « connexion » qui se fait. Malgré cela j’attends impatiemment le lever du jour. C’est pour autre chose. En effet je descends comme une caisse à savon dans le noir. Quelle grosse bouse !  12 bornes m’attendent avant le prochain ravito et deux belles ascensions. Je me fais rapidement rejoindre malgré tout. En montant je propose aux gens de passer mais non. Personne ne veut le lead du groupe. Alors je monte en essayant de ne ralentir personne. Déjà que je n’étais pas au top. Je me termine. Arrivé en haut de cette belle bosse en forêt, sur des petits monotraces sympa, je relance avec ce que j’ai. C’est à dire de moins en moins de jus. Le temps est dégueu. Il y a un brouillard très humide qui nous entoure. C’est une fois en haut que je comprends que le brouillard n’en est pas un. Nous sommes dans des nuages et le vent tristoune mais vif qui nous entoure nous en arrache des morceaux pour me les envoyer direct dans les lunettes. Merci ! La descente se fait en trottinant. Le jour s’est levé et mon suiveur est un gars des contreforts des Pyrénées. Nous discutons ensemble en descendant. Je lui demande s’il veut passer. Que nenni ! Bon ! Il reste à mes fesses dans l’ascension suivante. Preuve que je ne dois pas monter de façon si dégueu que ça. Je relance vraiment dans la descente suivante. Le ravito se profile et je suis détruit. Physiquement je me sens au bout du bout. Je suis fatigué ! Mais si je retiens ma descente j’ai peur de me faire mal aux cuisses pour rien. Alors je décide de me pencher en avant et de courir sans retenue. Quitte à être fini, autant que les cuisses soient mortes. Je descends aux alentours de 10km/h avec des belles pointes. Je vais même faire un kil en 5’14. C’est donc une belle descente qui se déroule sous mes pas. Je reprends Olivier Cottereau, un collègue de Chavagnes qui compte bien aller au bout de son premier long. J’arrive à Greffeil avec le Jogging qui fait la claque, comme d’habitude. Angéline est là et ça fait du bien. Elle m’avait dit qu’elle serait peut-être présente. Et sincèrement cela fait 2-3km que j’espère qu’elle sera là. Malgré ma descente rapide, mon état physique n’a pas changé. Je me sens détruit. C’est d’ailleurs ainsi que je lui présente la situation. J’ai déjà mangé une ou deux pompotes, une barre de céréales… Ça ne va pas. D’habitude j’attends un peu pour le sucré. Je rejoins Yvan, Fred, Cindy et Fabrice lors de ce ravito. Ils m’ont collé 9’ à l’entrée du ravito du 33ème et 1387D+. Et ça ne va pas s’arranger car je vais bien prendre le temps lors de celui-ci. Soupe, saucissons, soupe, saucissons, soupe. J’avais vraiment besoin de me poser 5′. Comme aux Templiers la semaine dernière. Comme au GRP fin aout (sauf que je n’avais pas d’avance face aux BH). Plein d’eau et enfin je repars avec une soupe dans les mains. Je me fais gentiment chambrer par les roses et noirs. Mais ça va carrément mieux ! Je repars en me faisant violence pour courir un peu. Un faux plat ? Je marche ! Ça descend ? Je cours ! C’est plat ? Je marche… je cours. Faux plat montant ? Je … je cours. Aller c’est reparti. Un coureur avec un maillot bleu va être un point de repère durant les 20 prochains kils car nous allons nous passer et repasser l’un l’autre. Lui en côte, moi en descente. Il y a une belle ascension qui suit. Comme d’hab. je me saigne aux quatre veines pour la grimper. Mais je redescends comme la précédente. 5’34 au mieux en moyenne. Ce n’est pas dégueu. Et surtout ce monotrace me parait bien sympathique. je m’amuse en descente. Je prends du plaisir. Je demande le passage et je l’obtiens facilement. Il faut dire que nous sommes assez étalés et que les concurrents m’entendent arriver de loin avec mon souffle de buffle et mon pas … ma foulée… Légère ? Au ravito je retrouve mes supporteurs du Jogging et surtout Angéline. Ça va vraiment mieux. Cette petite section de 8km montée/descente est top. Je n’hésite surtout pas à demander le passage en descente et c’est cool. J’insiste car comparé au GRP et aux Templiers ça me permet de courir comme je le veux, sur mon rythme.

Ladern sur Lauquet, 39,9km, 1651D+, 6h13’ de course. A ce ravito j’aperçois Cindy et Fred qui repartent quand j’y entre. Ils m’ont mis 10’. Fabrice que j’aperçois à l’intérieur, durant un ravito que j’estime être expéditif, y est depuis 6’. Mais il fait la gueule. Il est en phase basse. Pas sûr qu’il reparte. Je lui conseille de s’allonger 10’ mais rien n’y fait. Et Yvan ? Il a 19’ d’avance. Je vous dis tout ça mais à l’époque je n’en sais rien. Je n’ai ni le temps ni l’envie de demander à Angéline qui fait quoi en course. Je m’occupe de moi, c’est bien suffisant. Vous avez vu le bestiaud ? Il y a de quoi faire. Mais pour la lecture de ce récit je trouve intéressant de comparer un peu. Autant Fabrice découvre cette distance, et ce n’est pas une surprise de le voir subir un coup de moins bien. C’est assez courant dans une course, particulièrement chez moi, d’avoir une phase basse. Yvan, Fred, Cindy, qui sont des coureurs qui je l’estime, me sont bien supérieurs sur du long et je ne me fais pas de soucis pour leur course. Le seul dont je me préoccupe vraiment est Tintin. Christophe Robin. Dans nos conversations d’avant course, l’appréhension nous entourait tous les deux. Les nouvelles d’Angéline sont rassurantes sur ce point. Il passe tout.

Il me reste 25km. Et le profil est plus descendant qu’autre chose. Je me sens bien. Alors je relance fort en sortant du ravito. J’ai enchainé pompotes et coca. Je me sens parti pour « du grand Mendès » comme dit la magnifique citation historique tirée du film Camping. (Non mais sérieux quelle référence débile) Arrivé au 50ème le parcours rejoint celui du trail des Colombes. Et, déjà que je reprenais quelques coureurs isolés, je commence à manger des Colombes. Ça fait du bien. De là à dire que je fais mon bonheur dans la souffrance des autres, n’exagérons pas ! Hé oh ! Les bâtons sont très actifs dans les côtes. Je vais au moins à 2’ au kilo plus vite qu’avant dans les ascensions (plus courtes certes) mais je continue de descendre comme un demeuré. Les cuisses tiennent bon. Je reprends Fred et Cindy. Je les passe, un peu honteusement, en leur disant que j’ai une super forme mais que ça va finir par péter. Donc à tout à l’heure. Et je me dis bien qu’ils vont me reprendre. Je pense notamment aux 4 derniers kilomètres avant la citadelle, plats, dans les vignes, où il faut relancer. Je m’attends à être à l’arret dans cette portion. Je finis la section en trombe et je me présente au ravito de Montjausse-Palaja du 51ème en pleine forme. Je fais un « pit-stop » (pensée pour Thomas Jourdain) hyper rapide. Je me prends pour Mathieu Blanchard. Je vais tellement bien que plus rien ne peut m’arrêter. C’est le même ravito que la veille sur le 25km. Je connais la fin. Je distingue une lueur d’inquiétude dans les yeux d’Angéline. « Comment ça va ? »

  • Je suis en pleine bourre. Ça va chier ! lui répondis-je.

Et effectivement plus rien ne m’arrête. A ce dernier ravitaillement j’ai 8h de course. Fabrice passera 34’ après. Cindy et Fred 5’ après. Yvan a 5’ d’avance.

Je redémarre sur les chapeaux de roues. Je cours dès que je peux. Les bras sont très actifs avec les bâtons lors des petites côtes. Je ne perds aucun temps. Je me prends vraiment pour un vainqueur. Il va falloir redescendre un peu de ton nuage bonhomme. En tout cas cette fin de course fait très plaisir. Je n’en vis que rarement des comme ça. Il faut remonter au marathon des Causses il y a 6 ans pour avoir un truc qui y ressemble mais sur 4-5 km seulement. C’est vraiment difficile à décrire. Autant, à force de vivre des difficultés en course, je commence à avoir le bon vocable et le champ lexical qui va bien. Autant là…

Je rattrape Yvan à 8km de la fin, juste après avoir repris Nadine qui était sur le 40. J’ai repris les 19’ d’avance qu’il possédait au 40ème, non pas signe d’une éventuelle faiblesse chez Yvan, mais surtout d’une fin de course exceptionnelle (dans le sens de l’exception, le truc qui ne se reproduira sans doute jamais) de mon côté. Nous discutons un peu et je continue ma progression.  Je me trouve efficace dans la gestion des temps de course sur cette fin. Un petit coup de moins bien m’oblige à prendre une pâte de fruit mais très vite le chemin défile à nouveau sous mes pas. J’ai quand même enchainé 3 bornes à plus de 10 de moyenne dont un à 11 après le dernier ravito. Pourtant ça pioche de nouveau. Alors je pense à Angéline qui relançait courageusement hier. Donc je me force à courir quand la tentation de marcher est forte. « Allez relance. » « Encore une fois ! » La cité se profile. En approchant la poterne j’aperçois un dossard du trail des hérétiques. Et bien j’aurai des objectifs jusqu’au bout. Je continue de courir et comme depuis 2-3km, les bâtons poussent aussi en côte, façon ski de fond. Je cours en côte et je vole en descente. Je slalome entre les touristes dans la cité. Je passe des coureurs, Colombes ou Hérétiques ? Aucune idée. Je fonce. La dernière descente est goulument avalée. Je passe Solange qui doit me prendre pour un fou. Ma montre m’indiquera plus tard une pointe à 17km/h avec un dernier kilo en 13,5km/h. Je passe le vieux pont en souriant sous les encouragements du Jogging club.

Je franchis la ligne en sautant, rythmé par un grand YES ! Ça me vaut le micro du speaker. J’explique qu’enchainer Templiers, Patarins et Hérétiques ça pouvait tout de même bien ressembler à de la connerie et que je suis vraiment heureux d’en avoir fini et d’en avoir fini aussi bien ! Après cela, il y aura un petit moment de relâchement, assis au pied d’un mur avec quelques larmes qui roulent le long des joues. Normal. Il faut évacuer la tension.Mais bien vite le houblon et le malt prendront le dessus.

Finalement les 62km et 2500D+ sont courus en 9h08, soit à 6,7km/h. Avec les 10 derniers à 8,6km/h. Yvan arrive 15’ après. Cindy et Fred 22’ après et Fabrice 1h10 plus tard. C’est vraiment inattendu car ils me sont tous bien supérieurs en course. Cindy est inarrêtable avec un mental d’acier. Fred est une vraie fusée. Yvan est toujours devant sur toutes les courses que nous faisons ensemble avec un gros potentiel. Fabrice c’est quand même une superbe machine de football avec un foncier de fou. Du coup je ne sais comment expliquer cette course ! Car ils ont tous fait une très belle course ! La mienne est irrégulière, avec un coup de moins bien, comme d’habitude en fait. Mais en guise de se refaire la cerise, c’est plutôt la cerise sur le gâteau. Un gâteau au kirch même ! Je ne sais pas du tout comment expliquer ça ! J’espère juste pouvoir en revivre d’autres pareilles !

Et mon petit Tintin ? Il fini, en étant allé puiser dans les ressources. 11h02. Bravo Tintin ! On va s’en jeter une bien méritée.